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Bamba : "Jusqu’à 18 ans, je ne valais rien en mêlée"

Par Vincent Bissonnet
  • Bamba : "Jusqu’à 18 ans, je ne valais rien en mêlée"
    Bamba : "Jusqu’à 18 ans, je ne valais rien en mêlée"
Publié le Mis à jour
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TOURNOI DES 6 NATIONS 2019 - Élu homme du match pour sa deuxième titularisation en Bleu, le Briviste (20 ans, 3 sélections) s’est confié à nous en toute décontraction, au lendemain du match, pour évoquer son ascension, ses prises de conscience, son état d’esprit.

Midi Olympique : Comment avez-vous réagi quand vous avez entendu le speaker annoncer que l’homme du match était Demba Bamba ?

Demba Bamba : J’étais un petit peu surpris, quand même (gêné). En fait, cinq minutes avant le coup de sifflet final, j’étais sur le côté quand on m’a appris que j’étais homme du match. J’ai souri, j’étais content. C’est un super sentiment. De plus, j’avais la famille juste derrière qui me regardait. J’ai été à l’honneur mais je n’oublie pas que c’est le travail de toute une équipe.

Avez-vous eu droit à une séance de chambrage de la part de vos partenaires ?

D.B. : Oui, un petit peu. Yoann Huget, notamment, est venu me dire : "Si les piliers deviennent homme du match, alors j’arrête le rugby." C’était gentil, bon enfant. J’ai rigolé. J’étais encore sur l’émotion de la première victoire.

Aviez-vous beaucoup de proches au stade ?

D.B. : Quatorze personnes étaient venues me voir. Il y avait mes frères et sœurs, deux ou trois oncles et mes nièces. Le fait de les savoir présents donne un peu plus de force, sur le terrain. Tu ne veux pas les décevoir. Ils étaient super contents. Ma sœur, qui vit en Espagne, m’a vu jouer pour la première fois.

Vos parents n’étaient pas au stade, en revanche ?

D.B. : Ils sont restés à la maison, avec les petites. Ma mère m’a dit : "C’est impossible que je vienne voir tes matchs." Elle n’arrête pas de me demander si je ne suis pas blessé, si je n’ai pas pris de coup… Elle sera toujours comme ça, je pense. Mais je sais mes parents très fiers.

En tant que jeune joueur, en quoi pouvez-vous apporter à la vie de groupe ?

D.B. : À la base, je suis un peu timide. Mais plus le temps passe, plus je me sens à l’aise dans ce groupe. Je commence même à faire deux ou trois petites blagues. Après, c’est surtout sur le terrain qu’il faut s’exprimer. Avec les autres jeunes, on essaye d’amener une forme d’insouciance. On ne se pose pas trop de questions, on arrive, on tente des trucs…

Tout va très vite pour vous depuis un an. Racontez-nous…

D.B. : En 2017, j’étais encore avec les espoirs. Je commençais juste à côtoyer les pros. Le Top 14 me paraissait très haut. Puis j’ai joué en Coupe d’Europe et il y a eu cinq matchs de championnat. Je commençais à prendre confiance. Après, il y a eu les moins de 20 ans, c’était un rêve d’y être. Ça a continué à bien se passer et maintenant c’est le XV de France, le Graal.

Qui vous a aidé dans votre éclosion ?

D.B. : Un petit peu tout le monde mais surtout Saïd Hirèche. Il a été beaucoup présent. Il y a François Da Ros aussi. J’échangeais beaucoup avec lui sur les entrées en mêlées, sur la manière d’attaquer mon pilier… Tous les conseils sont bons à prendre et, ensuite, tu te fais ta propre opinion. Je suis aussi encore en contacts avec Nicolas Godignon qui m’a lancé.

Votre changement de statut vous a-t-il amené à aborder différemment les matchs ?

D.B. : Bizarrement, ma préparation n’a pas changé. Je me mets le moins de pression possible. Il m’arrive même de lâcher une blague dans le vestiaire. Il faut choisir la bonne personne avec qui rigoler car certains sont fermés sur eux-mêmes. Personnellement, j’ai besoin d’être tranquille, posé. Souvent, je mets mon casque pour me détendre. Il y a le discours du capitaine que j’aime bien. Ça mobilise toute l’équipe, c’est important. Mais se mettre des gifles, c’est pas mon truc. Si un coéquipier me met une gifle, j’aurais plus envie de jouer contre lui qu’autre chose.

Au quotidien, y a-t-il eu une évolution au fur et à mesure de votre ascension ?

D.B. : J’ai complètement changé dans mon approche. J’étais pas un grand fan de musculation. Ce n’était pas ma grande passion. Mais je savais que pour être bon, il fallait passer par là. Du coup, j’en fais souvent. Les courses sur le terrain non plus, c’est pas mon truc. Je préfère le cardio. On m’a fait prendre conscience que pour être bon sur le terrain, il fallait bien se préparer.

Vous avez porté douze fois le ballon face à l’Écosse. D’où vient cette appétence ?

D.B. : Je ne connaissais pas la stat… Oui, je suis content. Ce qui me fait rêver dans ce sport, depuis que j’ai commencé, c’est de toucher le ballon. J’ai débuté au poste de numéro 8 à Saint-Denis. En fait, j’étais pilier mais comme mes entraîneurs ont vu que j’avais un peu de gaz, ils m’ont replacé en troisième ligne. C’est là où j’ai pris beaucoup de plaisir.

Allez-vous en toucher un mot à Jacques Brunel ?

D.B. : Si je pouvais le revivre, ce serait cool. Mais maintenant, je suis pilier et ça me va très bien.

Avez-vous immédiatement aimé l’affrontement qu’implique ce poste ?

D.B. : Je suis passé par le hand pendant quatre ans. Je jouais arrière, poste dans lequel tu te retrouves fréquemment en duel avec ton vis-à-vis. J’ai retrouvé ça avec le poste de première ligne. En plus, tu peux mettre du choc. C’est le kif total pour moi.

Et la mêlée ?

D.B. : Jusqu’à 18 ans, je ne valais rien du tout. Je n’aimais pas ça. On m’a alors fait comprendre que si je voulais évoluer au haut niveau, je devais être bon dans ce secteur. Je n’allais pas changer de poste. Je me suis appliqué. Et maintenant, j’aime bien.

Toute la partie analyse et vidéo vous plaît-elle ?

D.B. : Ça non plus, je ne suis pas trop fan (rire). Il faut en faire, c’est sûr, mais je pense que ce n’est pas bon de passer trop de temps dessus. Quand j’étais chez les espoirs, il n’y avait pas de vidéo et tu t’adaptais quand même à ton adversaire. Trop de vidéo tue un peu le jeu à mon avis.

Qu’aviez-vous appris sur votre opposant du week-end ?

D.B. : Face à Dell, on avait vu qu’il fallait se mettre bas et le verrouiller.

Aviez-vous passé plus de temps derrière l’ordinateur avant d’affronter Mako Vunipola ?

D.B. : Bah non, ça m’aurait mis plus de pression qu’autre chose. J’ai regardé un peu de mon côté, j’ai fait un briefing avec les entraîneurs et voilà.

Il venait pourtant de réaliser un très grand match en Irlande…

D.B. : Je ne me suis pas pris la tête pour autant. Ce qui est drôle, c’est que mon frère me met toujours la pression quand je l’ai au téléphone. Il me répète sans arrêt : "T’as intérêt à être bon." Et là, avant ce match, il était déstabilisé et cherchait à me rassurer : "T’inquiète pas, tu n’as rien à perdre, nous sommes avec toi." Alors que j’étais bien dans ma tête.

Avez-vous ressenti une forme de complexe avant de défier ce qui se fait de mieux au niveau mondial, vous l’actuel joueur de Pro D2 ?

D.B. : Non, pour moi, ça reste du rugby. La seule interrogation que j’avais, c’était sur l’intensité et le rythme des test-matchs. Je me suis mis à travailler comme un fou. Je me déplaçais deux fois plus, je courais de partout à Marcoussis. À chaque nouvelle étape, je me dis : "Si tu te donnes les moyens, tu vas le faire."

L’appétit venant en mangeant, la Coupe du monde qui approche à grands pas est-elle devenue un objectif à part entière ?

D.B. : C’est comme tout. Je ne me projette jamais. Je vis le truc à fond. C’est comme cette année : jamais je ne m’étais dit que j’allais arriver en équipe de France et c’est venu. Voilà, je laisse le destin faire.

Propos recueillis avec Simon Valzer

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