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Le poids du néant

Par Emmanuel Massicard
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Publié le Mis à jour
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ÉDITO - Aussi grande soit-elle, l’histoire ne sera jamais qu’un perpétuel recommencement. Cette vérité athénienne vieille de bientôt 2500 ans (merci Thucydide !) a de quoi nous rassurer : malgré leur déliquescence, malgré le supplément de honte qui pèse sur leurs épaules après le passage de l’ouragan Fidji, les Bleus sauront rebondir.

Promis, juré, craché. Pas forcément demain mais un jour ou l’autre. Parce qu’ils sont déjà sortis du néant. Parce que ce revers concédé face à d’impressionnants Fidjiens n’est pas la première de nos humiliations. Et parce qu’il ne sera pas le dernier de nos tourments.

Oui, c’est écrit et nous lisons même dans cette promesse l’expression d’un mal terriblement français. Il n’y a qu’à parcourir l’histoire du XV de France pour constater qu’il hoquette à intervalles réguliers pour nous filer en colère.

Il y avait eu la Roumanie (à Auch, en 1990), l’Italie (à Grenoble, en 1997), les Tonga (à Wellington, en 2011). Il y aura désormais les Fidji, un 24 novembre 2018 au Stade de France. Qui n’avaient jamais battu la France ! C’est ici la part sombre du roman tricolore, une énième et fichue preuve de notre incapacité viscérale à nous inscrire en continu dans la performance.

En fait, une seule nuance se dégage à peine dans cette grisaille : si les précédents échecs ressemblaient à des accidents de parcours, celui-là fait suite à trop d’approximations pour que l’on puisse accréditer la thèse de la soudaine mésaventure ou du coup de Jarnac. Cette fois, la logique prédomine. C’est encore plus inquiétant. Et encore plus douloureux…

Tout se passe aujourd’hui comme si nous étions incapables de retenir les leçons du passé et, surtout, d’apprendre de nos erreurs. C’est bel et bien la pire des choses, vous en conviendrez. Et c’est ce qu’il y a de plus désespérant à quelques mois du Mondial. N’en doutez pas, notre mal est profond et les questions se font brûlantes. à qui la faute ? Comment ce groupe n’a-t-il pas vu le risque de la décompression après l’Argentine ? Comment le staff n’a-t-il pas appréhendé le danger face à une génération de joueurs qui semble répéter inlassablement les mêmes erreurs : un jour en quête de confiance et le lendemain péchant par excès de suffisance ?

De Marc Lièvremont à Jacques Brunel en passant par Philippe Saint-André ou Guy Novès, rien n’a finalement changé sur ce point. Il fallait bien s’y attendre, les sourires de Brunel ne produisent ici pas plus d’effet que la rigueur si vertement reprochée à Novès l’an dernier. Et le fameux « état d’esprit retrouvé » n’a pas résisté à la réalité d’un rugby français en perte totale de repères ; personne ne saurait être dupe, arrêtons de nous mentir.

Même avec une tournée d’automne largement à sa portée, le XV de France reste englué dans l’échec, confit d’orgueil mais pourtant bel et bien rongé par le doute. C’est clairement le paradoxe d’une équipe qui demeure ambitieuse mais qui n’en est pas moins incapable de conserver l’appétence minimale au combat qui lui permet juste de faire illusion depuis tant de mois.

Reste-t-il un pilote dans l’avion ? L’avenir nous le dira très vite. Une chose est certaine, à dix mois de la prochaine Coupe du monde, ce revers si peu glorieux mais tellement vrai a réduit en miettes les rares espoirs récoltés face à l’Argentine. Jusqu’à la prochaine révolte, le XV de France doit donc parer au plus pressé et assumer la politique du court terme qui lui sied tant.

A-t-il seulement d’autres solutions ? Nous serions prêts à jurer le contraire depuis que Bernard Laporte a appuyé sur le bouton de l’arme nucléaire pour changer de staff technique l’an dernier. Sans pouvoir de dissuasion, notre menace est devenue fantôme…

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