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Maxime Mermoz :« je suis un peu sauvage »

Par Marc Duzan
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    Maxime Mermoz :« je suis un peu sauvage »
Publié le Mis à jour
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Talentueux, atypique, attachant, Maxime Mermoz a quitté le Top 14 voici quelques mois. Comment ? Et surtout, pourquoi ? Le trois-quarts centre international nous explique tout.

Qui a tué Mermoz, à Toulon ? Diego Dominguez, pour avoir associé au milieu du terrain Nonu et « Basta », deux buildings par nature antinomiques ? Mike Ford, pour avoir persisté dans cette voie, crachant de fait sur le jeu d’évitement qui avait fait sa réputation à Bath ? Quels que soient les noms des coupables, le Top-14 s’est, au printemps dernier, séparé de « Max » dans une étrange indifférence… Mermoz, c’est pourtant un toucher de balle sans pareil, une façon bien à lui d’ouvrir un intervalle et, surtout, la survivance d’une certaine idée du rugby. Il y a quelques mois, au moment même où son agent (son frère aîné Gaëtan) a prospecté dans l’Hexagone, aucun des clubs dans lesquels « Max » souhaitait alors atterrir ne cherchait pourtant de trois-quarts centre. Lyon, Bordeaux et le Racing s’étaient timidement renseignés. Autant de dossiers classés sans suite. Prêté par le RCT dans les Midlands, Mermoz revenait, lui, d’une pige de deux mois à Leicester : « J’étais en contacts avec Dean Richards (le manager de Newcastle) depuis plusieurs années, explique-t-il. Au vu des orientations prises par les dirigeants du RCT les derniers mois avant mon départ, je me posais pas mal de questions… Il était clair qu’ils voulaient d’autres joueurs à mon poste. Alors, j’ai commencé à regarder ailleurs. » Ailleurs, les portes n’étaient qu’entrouvertes et, dans le grand Nord, Richards se montrait quant à lui de plus en plus insistant. À Newcastle, le salaire de « marquee player » (joueur hors masse salariale) que lui proposait l’ancien numéro 8 du XV de la Rose était juteux. On parlait aussi là-bas de l’arrivée possible de Toby Flood, d’un grand projet, d’une possible qualification européenne. Bon an mal an, l’option britannique est passée de tiède à brûlante. « Et j’ai franchi la Manche… »

L’autre monde

Aux frontières de l’Écosse, à près de 2000 kilomètres du cagnard de la Rade et des rivages du Mourillon, Mermoz (35 sélections) a basculé dans un autre univers : « Je vis dans une petite banlieue résidentielle, à cinq minutes du centre ville. La plage est à un quart d’heure. Mais pas la même plage, hein. Ici, ça ressemble davantage à la Bretagne… Newcastle ? C’est plutôt mignon. La vie culturelle est centrée sur les quais. Il y un marché, des galeries d’art, des restos… » Il dit avoir trouvé dans le Nord de l’Angleterre une existence paisible. Et à Newcastle, son nouveau cadre de travail semble pour le moment lui convenir : « Le Premiership, c’est d’abord une autre façon de se préparer. En Top 14, tout est trop chargé. On tire sur la corde, on fatigue les organismes et, au final, les joueurs manquent un peu de fraîcheur. Attention, nous travaillons beaucoup, ici. Mais je n’ai pas l’impression que ça nous ruine. Je n’ai pas les jambes lourdes comme je pouvais les avoir en début de saison, en France. » Et tant que la sainte drache n’a pas souillé les terrains britanniques, l’ancien Toulonnais prend son pied, outre-manche : « À Newcastle, la majeure partie de notre effectif est composeé de jeunes talents formés au club et totalement inconnus. Du coup, le collectif prime. On ne s’en remet pas, comme en Top 14, à l’exploit individuel de la star de l’équipe. […] Dans le championnat de France, les gabarits sont impressionnants et les rucks comme les sorties de balles s’en trouvent souvent ralentis. Tout va plus vite en Angleterre : le replacement, l’exécution… Je ne dis pas que c’est mieux. C’est juste différent. » Maxime Mermoz n’a signé qu’un an à Newcastle (la deuxième saison est optionnelle) et sera libre de revenir en France en fin de saison, dans la mesure où le Top 14 daigne enfin tendre la main à son mal aimé : « Je vais continuer à apprendre, ici. Et je reviendrai en France avec un peu plus de bagage. Si on veut de moi en équipe de France, tant mieux. Si ce n’est pas le cas, il n’y aura aucun malentendu. Certains jeunes me régalent, actuellement, chez les Bleus. Damian Penaud en fait partie… »

Le travail du deuil

À 31 ans, Maxime Mermoz est en pleine reconstruction à Newcastle. Très marqué par l’année passée, il s’explique : « La saison dernière fut une période assez horrible, sur le plan personnel et professionnel. J’ai perdu mon papa des suites d’une longue maladie, Mike Ford (alors manager du RCT, N.D.L.R.) ne me faisait jamais jouer et au lieu de me recroqueviller dans le rugby, j’ai été un peu spectateur… » Au fil des semaines, la situation lui a complètement échappé : « Je n’ai eu aucune prise dessus. Vous savez, mon père représentait beaucoup pour moi. Si j’ai débuté le rugby à Épinal à 6 ans, c’est uniquement pour faire comme papa. […] Sincèrement, je pensais que partir à l’étranger m’aiderait à tourner la page. Mais c’est loin d’être aussi simple. Le travail du deuil est quelque chose de personnel. La clé, je la trouverai en moi et pas ailleurs. Papa était mon meilleur ami, mon confident, mon modèle. Il était fier de ce que j’avais réalisé. » Maxime Mermoz, toujours très ému lorsqu’il évoque la mémoire de son père Gérard, marque une pause, soupire, attendant patiemment la prochaine question. On lui demande alors si sa personnalité, son naturel, ses cris du cœur flirtant parfois avec l’impudeur ne lui ont pas porté préjudice, à un moment ou à un autre de sa carrière. En clair, est-il réellement compatible avec l’ovalie bravache, l’atmosphère un brin paillarde et propre à tous les vestiaires du monde ? Au téléphone, on devine un sourire. Il poursuit : « Je suis quelqu’un d’assez sauvage. J’ai besoin de temps avant de faire confiance et besoin de temps avant d’être adopté. J’aime bien discuter avec tout le monde, dans un vestiaire. Mais je n’ai jamais appartenu à aucun clan. » Il jure pourtant avoir évolué, à ce propos : « À mes débuts, à Toulouse, je sortais très peu avec les mecs de l’équipe. Je n’ai jamais été un gros bringueur et en termes d’acclimatation, ça a parfois été difficile. En fait, je ne comprenais pas pourquoi il fallait boire pour s’intégrer… Mais j’ai changé, là-dessus. » Sur la bringue ? « Non, sur l’esprit de camaraderie. C’est important, presque vital, de côtoyer ses partenaires hors du terrain d’entraînement. Avec le recul, je me rends même compte que mes meilleurs souvenirs de rugbyman ne sont ni les médailles, ni les essais. Ce sont les petits moments partagés avec ces mecs, dont certains seront des amis pour la vie. »

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